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pas douteux. Mon oncle nous a dit que ta gaieté et ce petit air avec lequel tu débitais mille riens, lorsqu’il te vit il y a dix-huit mois à Valence, lui avaient fait penser que tu étais disposée à pouvoir profiter d’une bonne éducation. Je suis allée lui chercher ta première lettre ; en la comparant à la dernière, il ne pouvait comprendre comment, en si peu de temps, tu as pu acquérir une orthographe aussi correcte : il pense très-avantageusement de la méthode d’enseignement de la maison d’Écouen. Que de choses j’aurais pu apprendre, si j’avais été assez heureuse pour te suivre ! Mais le temps s’écoule ; je touche à ma dix-septième année. Je suis sûre que madame de ......... serait très-satisfaite de me voir acquérir quelques talens : elle m’aurait donné des maîtres pendant le temps que nous avons passé chez elle, s’il eût été possible d’en trouver à Clermont : mais Paris retient tous les artistes ; ils y sont, dit-on, en foule, et ne peuvent se décider à quitter, en faveur des départemens, cette ville célèbre que Napoléon rend plus que jamais le centre des beaux-arts.

Le triste récit que tu me fais de l’épidémie que vous venez d’éprouver est accompagné de détails bien touchans sur les soins religieux de vos dames, et sur le caractère sensible de cette pauvre petite élève qui sortira seule d’une maison où elle était entrée avec une amie dont la nature semblait l’avoir favorisée pour toujours. Voilà les plus terribles coups du sort ; lorsqu’on les éprouve, on