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criminelle pour oser faire un procès au roi, ce porte-feuille renfermait des pièces qui, révolutionnairement parlant, lui seraient funestes ; mais que, cependant, il y avait, dans ce même porte-feuille, une pièce qui, dans le même cas, pourrait être utile. C’était un procès-verbal d’un conseil où Sa Majesté avait opiné contre la déclaration de guerre.

La journée du 10 août arriva ; je n’étais pas de service ; mais je ne quittai pas l’appartement de la reine. Deux de mes sœurs, une de mes nièces y étaient avec moi. M. Rousseau, mon beau-frère, était rangé parmi les grenadiers des Filles-Saint-Thomas.

Après le siége, nous fûmes conduites, madame Auguié et moi, chez M. Auguié ; et j’appris, le lendemain, que la reine me demandait. Ma maison avait été pillée, je ne possédais plus rien, je n’avais plus une robe ; car je n’avais évité d’aller le 10 à l’Abbaye, qu’en me déguisant en servante. J’empruntai des vêtemens ; je me rendis aux Feuillans avec madame Auguié ; madame Thibaut, elle et moi, nous eûmes le douloureux honneur d’y servir la reine.

La reine avait su l’incendie et le pillage de ma maison ; dans cette misérable cellule des Feuillans, malgré le trouble, l’incertitude et la douleur qui remplissaient l’ame de Sa Majesté, elle daigna me parler de la perte que j’avais faite. J’en pris occasion pour lui dire que mes effets, étant tous épars sur le