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ques fautes ou commettre quelques erreurs ; on y compte, on les attend, on les grossit, on les fait circuler dans le monde, on les rapporte au prince sous l’apparence du zèle et du dévouement entier pour ses intérêts ; enfin, le plus souvent on parvient à son but. La faveur ne sauve de ces cruelles et persévérantes attaques, que ceux qui, par leur poste à la cour, ne quittent jamais le prince, et peuvent se défendre à toutes les heures du jour ou de la nuit.

Les travaux des ministres ne leur donnent point cette facilité ; ils ne peuvent paraître que des momens à la cour ; aussi sont-ils facilement attaqués et déplacés, quand le souverain ne s’est pas fait la loi, quelque chose qu’il entende dire, d’en changer le moins possible. Les charges qui ont des temps de repos ne procurent jamais une grande faveur, parce qu’elles donnent le temps d’agir aux sapeurs infatigables des cours. Pendant que l’action est de cette chaleur dans l’intérieur des palais, on a soin de lancer quelques traits, même au loin, contre tout ce qui a du mérite ; on sait que c’est ce qui fait sortir de la foule, et qu’il est plus aisé d’y atteindre ceux qui y sont encore. On ne voit jamais une disgrâce avec peine, c’est un homme tombé dans les rangs. La mort et les disgrâces n’amènent à la cour que la même idée : par qui celui qui disparaît sera-t-il remplacé ?