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nait à un chapeau : les plus simples étaient préférés, et les diamans ne sortaient des écrins que pour les parures d’étiquette consacrées aux jours que je viens d’indiquer.

La reine n’avait pas encore vingt-cinq ans, et commençait déjà à craindre qu’on ne lui fît faire trop d’usage des fleurs et des parures qui, dans ce temps, étaient encore réservées à la seule jeunesse.

Mademoiselle Bertin lui ayant apporté une guirlande et un collier de roses, la reine l’essayait en craignant que l’éclat de ces fleurs ne fût plus avantageux à celui de son teint. Elle était véritablement trop sévère sur elle-même : sa beauté n’ayant encore subi aucune altération, il est aisé de se faire idée du concert de louanges et de complimens qui répondirent au doute qu’elle avait énoncé. La reine, s’approchant de moi, imagina de promettre de s’en rapporter à mon jugement lorsqu’il serait temps qu’elle abandonnât la parure des fleurs. « Songez-y bien, me dit-elle ; je vous somme, dès ce jour, de m’avertir avec franchise du moment où les fleurs cesseront de me convenir. — Je n’en ferai rien, Madame, lui répondis-je aussitôt ; je n’ai pas lu Gil-Blas pour n’en retirer aucun fruit, et je trouve l’ordre de Votre Majesté trop semblable à celui que lui avait donné l’archevêque de Tolède, de l’avertir du moment où il commencerait à baisser dans la composition de ses homélies. — Allez, me dit la reine, vous êtes