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lui donner une potion anti-spasmodique ; elle la refusa, en disant que les maux de nerfs étaient la maladie des femmes heureuses ; que l’état cruel où elle était réduite rendait ces secours inutiles. En effet, la reine qui, pendant le temps de son bonheur, avait souvent des crises spasmodiques, eut la santé la plus égale depuis que toutes les facultés de son ame soutenaient ses forces physiques.

À son insu, je lui avais fait faire un corset semblable au gilet du roi ; mais elle ne voulait pas en faire usage ; mes prières, mes larmes, tout fut inutile. « Si les factieux m’assassinent, répondit-elle, ce sera un bonheur pour moi, ils me délivreront de l’existence la plus douloureuse. » Peu de jours après que le roi eut essayé son plastron, je le rencontrai dans un escalier intérieur ; je me rangeai pour le laisser passer. Il s’arrêta et me prit la main ; je voulus baiser la sienne, il s’y refusa,

    toinette, que celle d’Henriette de France, fille de Henri IV, épouse de Charles Ier et mère de Charles II. Comme Henriette, elle était étrangère au milieu d’un peuple dont on avait excité la haine contre elle ; comme Henriette, on l’accusa d’exercer trop d’empire sur le cœur du roi ; elle eut sans cesse à craindre, comme elle, pour les jours de son mari ou de ses enfans ; le plus funeste coup les frappa toutes les deux ; mais elle n’eut point, comme Henriette, après de longs malheurs, la consolation de voir sa famille remonter sur le trône. La fin tragique et déplorable de Marie Stuart attendait celle qui avait épuisé toutes les infortunes d’Henriette de France.

    (Note de l’édit.)