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de rendre sa société intime agréable à madame Adélaïde.

Depuis plusieurs années, madame Louise vivait très-retirée ; je lui faisais la lecture cinq heures par jour ; souvent ma voix se ressentait des fatigues de ma poitrine ; la princesse me préparait de l’eau sucrée, la plaçait auprès de moi, et s’excusait de me faire lire si long-temps sur la nécessité d’achever un cours de lecture qu’elle s’était prescrit.

Un soir, pendant que je lisais, on vint lui dire que M. Bertin, ministre des parties casuelles, demandait à lui parler ; elle sortit précipitamment, revint, reprit ses soies, sa broderie, me fit reprendre mon livre, et, quand je me retirai, elle m’ordonna d’être, le lendemain à onze heures du matin, dans son cabinet. Quand j’arrivai, la princesse était partie ; j’appris que le matin à sept heures elle s’était rendue au couvent des Carmélites de Saint-Denis où elle voulait prendre le voile ; je me rendis chez madame Victoire. Là j’appris que le roi seul avait connu le projet de madame Louise, qu’il en avait fidèlement gardé le secret, et qu’après s’être long-temps opposé à son désir, il lui avait envoyé la veille seulement son consentement ; qu’elle était entrée seule dans le couvent où elle était attendue ; que quelques instans après elle avait reparu à la grille, pour montrer à la princesse de Guistel, qui l’avait accompagnée, et à son écuyer, l’ordre du roi de la laisser dans le monastère.

À la nouvelle du départ de sa sœur, madame