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point à introduire parmi les troupes le bon ordre ni la discipline.

Mais, avant de retracer les moyens dont le ministre Acton se servit pour donner à l’armée une organisation nouvelle, jetons un coup d’œil rapide sur les événemens politiques qui occupèrent la cour de Naples pendant les huit à dix années qui précédèrent l’époque où on la verra jouer un rôle parmi les puissances liguées contre la nation française.

Sans doute le roi d’Espagne ne voyait pas sans peine que, depuis qu’une Autrichienne était entrée dans le conseil du roi son fils, il y avait perdu toute espèce d’influence ; que l’Angleterre était favorisée au détriment de la France, à qui tant de motifs, et surtout l’intérêt du commerce, devaient si fortement lier le royaume de Naples. Mais long-temps Charles III se contenta de donner par ses lettres, ou par ses ambassadeurs, de simples avis, ou de faire des reproches modérés : bientôt il fallut parler en père irrité et presque en maître.

La France était dans l’usage d’acheter dans les Calabres des bois de construction ; sous prétexte que ces bois étaient nécessaires à la marine que l’on s’occupait à former, Acton empêcha la France d’en exporter du royaume. La cour de Versailles dissimula son ressentiment.

Précisément à cette époque, arriva cet épouvantable tremblement de terre de la Calabre, où périrent tant de milliers d’hommes, où tant d’autres restèrent sans asile et sans pain. À la nouvelle de ce désastre, la cour de France, oubliant tous motifs de mécontentement, fit expédier une frégate chargée de blé, afin que le roi de Naples pût procurer promptement des secours aux malheureux habitans des pays ravagés. Le ministre fit refuser sèchement un don qui certes n’avait rien d’injurieux et qui ne pouvait être que désintéressé : tant la haine est déraisonnable !

Cette conduite envers la France irrita tellement le roi