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et lui disait même, en notre présence, qu’il devait connaître non-seulement tout ce qui existait à Paris, mais voyager en France, et résider quelques jours dans chacune de ses grandes villes.

La reine finit par être blessée de l’indiscrète sincérité de l’empereur, et par lui faire elle-même quelques leçons sur la facilité avec laquelle il se permettait d’en donner. Un jour qu’elle était occupée à signer des brevets et des ordonnances de paiemens pour sa maison, elle s’entretenait avec M. Augeard, son secrétaire des commandemens, qui lui présentait successivement les objets à signer, et les replaçait dans son porte-feuille. L’empereur, pendant ce travail, se promenait dans la chambre ; tout-à-coup il s’arrête pour reprocher assez sévèrement à la reine de signer tous ces papiers sans les lire, ou, au moins, sans y jeter les yeux, et lui dit les choses les plus justes sur le danger de donner légèrement sa signature. La reine lui répondit que l’on pouvait appliquer très-mal de fort judicieux principes ; que son secrétaire des commandemens, qui méritait toute sa confiance, ne lui présentait, en ce moment, que les ordonnances du paiement des trimestres des charges de sa maison, enregistrées à la Chambre des comptes ; et qu’elle ne risquait pas de donner inconsidérément sa signature[1].

  1. Ces paroles se trouvent confirmées par les renseignemens que donne madame Campan sur l’ordre établi dans la comptabilité des fonds appartenant à la cassette de la reine [***].
    (Note de l’édit.)