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à le faire croire : elle prit pour amant Gabriel de Saint-Charles, intendant des finances de Sa Majesté, charge dont les priviléges se bornaient à jouir, le dimanche, des entrées de la chambre de la reine. Madame de Villers venait tous les samedis à Versailles avec M. de Saint-Charles, et logeait dans son appartement ; M. Campan s’y trouva plusieurs fois : elle peignait assez bien, elle le pria de lui rendre le service de présenter à la reine un portrait de Sa Majesté qu’elle venait de copier. M. Campan connaissait la conduite de cette femme, et la refusa. Peu de jours après, en entrant chez la reine, il vit sur le canapé de Sa Majesté le portrait qu’il avait refusé de lui présenter ; la reine le trouva mal peint, et donna l’ordre de le faire reporter chez la princesse de Lamballe qui le lui avait envoyé. Madame de Villers était parvenue à faire réussir son projet par l’entremise de la princesse. Le peu de succès du portrait ne détourna pas l’intrigante de suivre le dessein qu’elle avait de se faire croire admise dans l’intimité de la reine ; elle se procura facilement, chez M. de Saint-Charles, des brevets et des ordonnances signés par Sa Majesté ; elle s’appliqua à imiter son écriture, et composa un grand nombre de billets et de lettres écrites par Sa Majesté dans le style le plus familier et le plus tendre. Pendant plusieurs mois elle les montra sous le plus grand secret à plusieurs amis particuliers ; puis elle se fit écrire de même, par la reine, pour des acquisitions d’objets de fantaisie dont elle la priait de se