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n’enviait pas le rôle important et dangereux que s’attribuait l’abbé de Vermond dans la nouvelle cour ; qu’il se bornerait aux fonctions de ses charges, assez satisfait des bontés constantes dont la reine l’honorait, pour ne rien désirer de plus. Cependant il rendit compte, dès le soir même, à la reine, de l’injonction qu’il avait reçue. Elle lui avoua qu’elle avait parlé de sa conversation à l’abbé ; qu’il l’avait, en effet, sérieusement grondée, pour lui faire sentir la nécessité du secret dans les affaires ; et elle ajouta : « L’abbé ne peut vous aimer, mon cher Campan, il ne s’attendait pas que je trouverais dans mon intérieur, en arrivant en France, un homme qui me conviendrait aussi parfaitement que vous[1]. Je sais qu’il en a conçu de l’ombrage ;

    mais il l’était d’annoncer qu’il serait initié dans les secrets les plus intimes.

    (Note de madame Campan.)

  1. L’abbé de Vermond, à la vérité, ignorait que la jeune princesse trouverait dans son intérieur un homme instruit, capable de l’intéresser par des récits piquans et spirituels sur la cour de Louis XV, sur celle du régent, et même sur celle de Louis XIV. L’abbé avait eu soin, à Vienne, de prévenir madame la dauphine contre M. Moreau, ancien avocat aux conseils et historiographe de France, que ses talens avaient fait choisir pour être son bibliothécaire. Le lendemain de l’arrivée de madame la dauphine à Versailles, madame la comtesse de Noailles lui demanda quels ordres elle avait à donner à M. Moreau. Elle répondit que le seul ordre qu’elle eût à lui donner était de remettre la clef de sa bibliothèque à M. Campan qu’elle chargeait de ses fonctions ; qu’il pouvait garder le titre qui lui avait été donné par le roi, mais qu’elle n’acceptait pas ses services. La dame d’honneur se récria beaucoup