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LES BELLINI.

fameux Condottiere du Louvre qu’Antonello créa, tres probablement à Venise, quatre ans avant le voyage de Gentile à Constantinople. Rappelons-nous aussi combien les mécènes italiens de l’époque appréciaient les œuvres des Van Eyck, de Van der Weyden, de Justus Van Ghent et de Van der Goes. Nous retrouvons leurs noms dans l’inventaire des collections princières à Florence, à Naples, à Ferrare, à Urbin. Nul doute que plusieurs de leurs œuvres, venues à Venise, n’aient été l’objet de l’admiration de Gentile [1].

L’absence de documentation ne nous permet pas de déterminer exactement dans quelles conditions Gentile, après son retour de Constantinople, travaillai la décoration de la salle du Grand Conseil.

Giovanni, on s’en souvient, lui avait succédé dans la restauration des anciennes fresques, et il faut croire que c’est lui qui persuada la Seigneurie de la nécessité de renouveler complètement la décoration de la salle, en substituant à la fresque le tableau peint sur toile, « suivant le nouveau procédé », pour me servir de l’expression employée, quelques années plus tard, par Alvise Vivarini.

  1. Mahomet avait donné à son peintre favori le titre de bey, que celui-ci convertit en l’épithète mieux sonnante d’eques aureatus. Il faut croire que, très humainement, l’artiste se complut à faire parade de son titre. Il en parle dans une inscription tracée sur l’une des toiles de la salle du Grand Conseil. Et, dans le Prêche de Saint-Marc, il se représente — ou Giovanni le représente — portant au cou une lourde chaîne d’or, emblème de sa dignité. Un satiriste contemporain aurait voulu faire chausser des éperons d’or à ce « chevalier bouffi d’orgueil ».