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LES BELLINI.

précise de cet événement. Selon les uns, les deux artistes auraient séjourné ensemble à Venise ; selon les autres, Pisanello aurait succédé à Gentile. On s’accorde pourtant à reconnaître que les fresques que la Seigneurie leur avait commandées, pour la salle du Grand Conseil, furent peintes entre 1410 et 1420 — soit à l’époque où Jacopo devait commencer son apprentissage [1].

L’inspiration qui guide ces deux artistes est si semblable, leur vision de la vie, leur technique, se rapprochent à un tel point qu’il semble bien difficile de les distinguer. Songez à la célèbre Adoration des Mages de Gentile (Académie de Florence), dont une des prédelles est au Louvre, et comparez-la aux fresques de Vérone et aux dessins du recueil Vallardi de Pisanello (également au Louvre). N’est-ce pas la même profusion de détails, la même richesse d’imagination, mais aussi la même conscience scrupuleuse dans l’observation de la nature, la même perfection technique dans la réalisation des animaux et des fleurs, le même souci de réalisme individualisant chaque physionomie, introduisant les vêtements de l’époque dans les divers épisodes de la légende chrétienne ?

Que nous voilà loin de la vision synthétique de Giotto, de

  1. Pour qui a quelque peu pratiqué les œuvres des deux maîtres, il importe assez peu de savoir lequel des deux a précédé l’autre à Venise et lequel des deux s’est attaché le jeune Jacopo. Il est tout naturel que ce soit Gentile, comme le veut la tradition, car il était de vingt-sept ans plus âgé que Pisanello et devait réunir autour de lui un plus grand nombre d’élèves, mais nous n’aurions sans doute pas une ligne à changer à cette étude si le peintre véronais s’était substitué au maître ombrien.