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Les grandes invasions mongoles du xiiie siècle, que l’on associe au nom de Ghenghiz Khan, ne se manifestèrent pas seulement en Europe. Tandis que la horde d’Or occupait les steppes au nord du lac Aral et de la Caspienne et s’étendait à l’ouest jusqu’aux Carpathes, une autre horde entrait en Perse, en Mésopotamie et en Syrie. et une troisième envahissait la Chine septentrionale. Seules de toutes les régions bordières groupées autour des grands plateaux d’où partait ce mouvement d’invasion, la Chine méridionale et l’Inde, restaient indépendantes, protégées par la barrière de l’Himalaya et par les contreforts orientaux du plateau. Mais, à l’époque de Marco Polo, pour la Chine méridionale, et à celle de Tamerlan, pour l’Inde, cet obstacle fut contourné[1].

Nous constatons donc que les invasions asiatiques rayonnent autour d’une région centrale parfaitement appropriée à la vie nomade par ses steppes étendues et le caractère défavorable, au point de vue du commerce, de ses cours d’eau aboutissant tous à des bassins fermés (Tarim, Amou Daria, Syr Daria, Illi), ou à un océan couvert de glaces. Cette zone desséchée, ne contenant qu’une population clairsemée, s’étend de la Hongrie à la Mandchourie et de la région forestière sibérienne au plateau du Thibet. Toute la zone bordière bien arrosée, apte à la culture, est couverte d’une population dense. Elle comprend l’Europe occidentale, l’Asie antérieure, les Indes et la Chine et a eu, de tous temps, à subir les assauts des populations nomades et guerrières du centre de l’Eurasie[2].

Chacune de ces divisions coïncide avec la sphère d’influence des quatre grandes religions : Christianisme, Mahométisme, Brahmanisme et Boudhisme. Le point faible de cette ceinture de terres fertiles, en contact avec la mer, est l’Asie antérieure ou le « Pays des cinq mers ». Cette région, beaucoup moins humide, renferme de grandes étendues désertes et n’a pas vu se constituer de civilisations aussi puissantes que l’Extrême Orient et l’Occident, elle ne

  1. D’autres auteurs considèrent que l’Hindoustan est tombé au pouvoir des Mongols dès 1218 (Weber, Moyen-âge. V. 18).
  2. Citons encore l’invasion turque dans l’Asie antérieure qui précéda de trois ou quatre siècles les grandes invasions mongoles, provoqua les croisades et contribua ainsi à fortifier l’unité européenne. On pourrait encore relever plusieurs invasions ayant pénétré en Chine par le N., dans l’Inde par le N. O.