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LE BEAU RÉVEIL

avec moins de minutieuse précision, dans les êtres corporels, tous les traits, et principalement ceux qui typent et individualisent et caractérisent. Et c’est là une qualité éminemment propre au poète.

Envisageons en Claudel le poète et l’artiste, maintenant que nous avons admiré le chrétien et le penseur. À vrai dire, ce ne sont là qu’aspects différents d’une même forte personnalité en qui s’interpénètrent la foi, la science et la poésie. Claudel appelle lui-même ses ouvrages philosophiques « des poèmes » ; ses poèmes proprement dits sont lourds de pensées philosophiques ; et la Foi est l’âme de toute son œuvre.

Paul Claudel a écrit plusieurs drames : Tête d’Or, la Ville, l’Échange, le Repos du 7e Jour, Partage de midi, l’Otage, l’Annonce faite à Marie, le Pain Dur ; des poèmes lyriques : Processionnal, Cinq grandes Odes, Poèmes pendant la Guerre, Corona Benignitatis Anni Dei, Une Messe là-bas, etc.

Les drames de Claudel, qui constituent la majeure partie de son œuvre, ne sont guère accessibles aux lecteurs ordinaires. Ils déconcertent, surtout ceux composés avant 1910, par leur étrange structure, l’abstraction des personnages, le ton du dialogue ; on ne peut suivre ; on ne comprend pas toujours. On se sent transporté dans un monde de rêve, qui a sa beauté, certes, mais qui diffère par trop de côtés du monde tel que nous le connaissons. « Tout, dit Georges Duhamel, semble étranger au monde des proportions courantes. Il nous faut jeter la vieille balance et le vieux compas, s’il nous plaît d’entretenir commerce avec cet homme. Nous lisons, et nous devons tout aus-