Page:Camille Melloy - Le Beau Réveil, 1922.djvu/53

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
45
LA POÉSIE CATHOLIQUE D’AUJOURD’HUI

symbole d’une réalité invisible ? Il est tout naturel qu’au sortir de la Messe, dont le souvenir embaume leur vie, nos poètes chrétiens, en voyant l’abeille, par exemple, pensent à la cire des cierges pour laquelle elle travaille et qui sont, dans la symbolique chrétienne, l’image du Sauveur, lumière du monde ; que le lin leur rappelle la nappe d’autel ou de communion, ou le corporal sur quoi reposera l’Hostie consacrée ? Mais laissons parler, ici encore, le théoricien de l’École :

« La nature est une vaste liturgie. Toute la création unie dans le même concert, reflétant la même lumière, s’interpénétrant du même symbole, manifeste la profonde union de l’esprit et de la matière, la Présence continue de Celui qui a donné la vie aux plus obscurs atomes comme au plus illustre Séraphin… Tout porte le sceau du Christ, Fils unique du Père : la gerbe de blé se courbe sous le poids de l’Hostie ; le puits évoque la Samaritaine, et l’eau qui purifie ; l’agneau qui passe a le nimbe de la victime expiatoire qui assuma les péchés du monde ; l’âne marche, entouré du bruissement des palmes et des hosannahs ; le buisson nous tend les épines du diadème dérisoire ; et l’arbre sur l’horizon fait à jamais de ses branches offertes le signe de la Croix rédemptrice… »[1].

  1. Robert Vallery-Radot : Le Réveil de l’Esprit.
    — Émile Baumann écrit à son tour : « Les plantes souffrent une peine confuse, le deuil du premier Paradis, l’attente de la gloire et de la paix dernière. Toutes les créatures ont sur elles le signe de la Passion, puisqu’elles sont l’œuvre du Verbe fait Chair et crucifié par consentement depuis l’origine des siècles. Mais nous, nous savons qu’Il souffre, et à cause de nous. — Chercherons-nous dans cette vie autre chose qu’un miroir de la Rédemption ?
    (Le Baptême de Pauline Ardel.)