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LA POÉSIE CATHOLIQUE D’AUJOURD’HUI

Ce sentiment-là de la nature se nomme le franciscanisme, parce qu’il a trouvé pour la première fois son expression la plus touchante dans la vie et les cantiques de l’admirable François d’Assise, grand saint doublé d’un grand poète. Mgr de Keppler résume ainsi les traits les plus gracieux et les plus émouvants de la charité du grand Saint envers les créatures inférieures :

« Tout ce qui vit et entend, tout ce qui verdit et fleurit, tout ce qui vole ou rampe, tout ce qui chante ou grésillonne, l’invitait à la joie parce que tout, dans la création, lui parlait du Créateur. Le soleil, la lumière, le feu, les sources et les ruisseaux, les rochers et les arbrisseaux fleuris, les oiseaux et les brebis devenaient ses frères et ses sœurs, et il conversait avec eux comme avec ses pareils. Dans le jardin du couvent, il voulait qu’il y eût toujours une place réservée « pour ses sœurs les fleurs ». Il a presque du respect pour l’eau, parce qu’elle lui rappelle le saint Baptême : quand il se lave les mains, il a soin qu’aucune goutte d’eau ne se répande à terre, de peur qu’elle ne soit foulée aux pieds. Il passe avec révérence devant les rochers, en pensant à Celui qui s’est appelé la pierre angulaire. Voyant un jour un frère occupé à abattre un arbre, il le supplie d’en laisser subsister quelque chose, afin qu’il puisse repousser et reverdir. Pour que deux agneaux ne soient pas vendus et égorgés, il donne son manteau au paysan qui les porte à l’abattoir ; lorsqu’il les entend bêler, ému de pitié, il les caresse et les console comme une mère son enfant. À la Portioncule, un agneau apprivoisé le suit partout où il va, même à l’église, où il bêle doucement pendant l’office, comme s’il faisait aussi partie du chœur. Un jour, à Sienne, un trou-