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LA POÉSIE CATHOLIQUE D’AUJOURD’HUI

spectacle coloré, mais moins qu’une émanation de l’Être Divin. Elle est une œuvre de Dieu et donc éminemment digne de notre amour, à cause de son origine, de son essence et de sa destinée.

Le pouce du divin Sculpteur n’est-il pas empreint sur chacune des créatures ? Peut-on les envisager sans y voir l’œuvre des Six Jours ? Sans doute l’homme a enlaidi le monde, par ses destructions et — peut-être encore davantage — par ses constructions. Mais ces grossières ratures sur la page divine n’ont point effacé la signature[1] !

« Ouvrez les yeux ! s’écrie Paul Claudel, le monde est encore intact ! Il est vierge comme au premier jour, frais comme le lait ! » — Et ailleurs :

« Salut donc, ô monde nouveau à mes yeux, ô monde maintenant total,

« Ô credo entier des choses visibles et invisibles, je vous accepte avec un cœur catholique !…

« Où que je tourne la tête,

« J’envisage l’immense Octave de la création ! »

Ouvrage de Dieu, reflet de sa gloire, objet de son amour infini, la nature est destinée à louer Dieu, et elle le loue en effet, déjà par sa seule existence. Songez-vous à cette merveille : exister, être posé dans l’espace et le temps, — un, vrai, et distinct de tout[2], — avoir une place et un rôle dans le grandiose ensemble de la création ? « Aux heures vulgaires, dit encore Paul Claudel, nous nous servons des choses

  1. « Invisibilia enim ipsius, a creatura mundi, per ea quaæ facta sunt, intellecta conspiciuntur » (Rom I 19).
  2. « Oh ! qu’une vigne fait bien sur le moindre mur, et le rosier dessus quand il est en fleurs, qu’il est beau et que c’est réel tout ensemble » (Paul Claudel).