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LE BEAU RÉVEIL

s’éprouve à la vie éternelle, la chair enfin ressuscitera au dernier jour pour jouir de la gloire dans tous les siècles des siècles[1]. »

« Que vos créatures, Seigneur, sont admirables ! s’écrie Francis Jammes. Que le vase d’argile, plein de l’eau du baptême, est digne d’être aimé[2] ! »

Voilà donc le respect du corps imposé comme une loi au poète, autant qu’à tout homme. C’est la mort du sensualisme littéraire.

Une telle conception de l’homme, racheté par le Christ, membre de son Corps mystique, on voit comme elle doit renouveler le drame, approfondir le lyrisme, regénérer le roman. Et elle l’a fait : témoin les drames de Claudel, les romans substantiels et solides d’Émile Baumann, et ceux, poétiques et gracieux, de Francis Jammes converti ; témoin aussi les nombreuses œuvres lyriques, parmi lesquelles il faut citer ici celles de Charles Grolleau et de Germain Nouveau.

Voyons maintenant comment nos poètes catholiques comprennent le monde extérieur et à quel degré ils possèdent le sentiment de la nature, qui est une des grandes sources du lyrisme. Le sentiment de la nature n’était, chez les anciens, qu’une forme du culte de la beauté extérieure, chez les Romantiques et certains modernes, qu’une forme de l’exaltation du moi, ou une langueur morbide, ou une ivresse panthéïste.

Pour le lyrique chrétien, la nature est plus qu’un

  1. Rob. Vallery-Radot. Le Réveil de l’Esprit.
  2. Francis Jammes. M. le Curé d’Ozeron.