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LE BEAU RÉVEIL

idéal spirituel ! Que dis-je ? — en passant par des tempéraments divers, les mêmes émotions doivent nécessairement revêtir des expressions diverses. Et voilà bien un orchestre complet et magnifique, où se mêlent toutes les voix : orgues majestueuses des Odes claudéliennes, harpe céleste des Carmina Sacra de Louis Le Cardonnel, pipeau champêtre des Géorgiques chrétiennes de Francis Jammes, flûte naïve des chansons de Max Elskamp.

Et que dit cette symphonie nouvelle ? Quels thèmes développe-t-elle, et comment ? C’est ici que deviendra palpable l’originalité de l’École catholique, et ce par quoi elle rajeunit et enrichit l’inspiration poétique moderne. Dieu, la nature, l’âme, la vie, l’amour et la mort, aucun de ces grands thèmes humains ne lui est demeuré étranger. Mais elle les a élevés, élargis, ennoblis.

Sa conception de l’homme et de l’univers amène dans l’art une véritable révolution. Nous verrons désormais représenté l’homme complet, comme il apparaît dans les sublimes épîtres de saint Paul, l’homme en qui deux lois se combattent, celle des membres de ce corps de mort, et celle de Dieu. Nous verrons le chrétien en chair et en os, en qui opèrent les forces profondes de la vie surnaturelle. Réalistes dans le meilleur sens du mot, nos auteurs ne négligent pas la grande réalité : la grâce croissant en nous par la prière et les sacrements[1]. Ils ne considèrent pas les hommes

  1. « Un royaume presque inconnu à la poésie séculière, et où seul Dante a osé s’aventurer, s’ouvre maintenant à nos yeux éblouis de tant de richesses : le royaume de la Grâce. » (R. Vallery-Radot, Anthologie de la Poésie catholique : préface).