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LA LITTÉRATURE ET LA GUERRE

Bazin, de Bordeaux, quelques-uns de Bourget et de Barrès et d’autres ont contribué à hâter ce retour.

Ce mouvement, dans l’esthétique, devait s’accompagner d’un revirement en faveur de la tradition classique. Romantisme, naturalisme, décadentisme n’avaient été, somme toute, que des exploitations de brevets étrangers. On l’a vu trop tard. Car si, dès avant la guerre, comme le remarquait en 1913 Émile Faguet, la plupart des jeunes critiques étaient classiques, beaucoup de jeunes poètes demeuraient, au fond, romantiques. Mais ceux-là qui n’ont point cru alors, les défenseurs de l’intelligence française, ont dû écouter la voix des faits. Toutes les idoles du XIXe siècle gorgé d’orgueil et d’erreurs sont apparues vermoulues, pourries et creuses ; et les vrais maîtres de l’heure n’ont eu qu’à les toucher du doigt pour les faire écrouler. Nul ne peut nier encore que la force et la vitalité de notre art résident précisément en ses qualités traditionnelles de raison, de clarté, de mesure, d’équilibre, de goût, et que sans elles il mourrait.

Pendant plus d’un siècle on a bafoué la Règle, la considérant comme une contrainte, alors qu’elle est un fil conducteur. Aujourd’hui, après une malheureuse expérience, on la reprend, parce qu’on la reconnaît indispensable. On veut enfin restituer à la Raison le rôle usurpé par l’imagination et la sensibilité effrénées. Le Parti de l’Intelligence et la Ligue de l’amitié française se sont constitués pour « la réfection de l’esprit public par les voies royales de l’intelligence et des méthodes classiques ». La Revue Universelle avec Jacques Bainville et Henry Massis, les Cahiers Français, avec Alphonse Mortier, la Revue Critique des Idées et des Livres, dont vingt sur trente des ré-