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PARENTHÈSES

lées, plantées de lauriers ou de thuyas, divisent les plates-bandes de velours grenat, blanc, rose, des bégonias, et les frais carrés de plantes vertes ; mènent à des serres où les azalées font de leurs bouquets qui se touchent un épais tapis de neige bariolée, où les gloxinies penchent, au bout de tiges grasses, de longues cloches aux couleurs chaudes, où les palmiers éploient dans la chaleur humide leurs belles formes immobiles, comme métalliques…

Oh ! ces fleurs et ces palmes ! Comme l’enfant les admirait ! Il les faisait revivre dans le paradis de ses rêves. Si profondes furent les impressions qu’il en reçut, que longtemps les lointains eldorados le hanteront, et qu’avant de se faire le chantre de la vie toute simple, il égarera ses débuts en des essais de poésie exotique.

Au collège, l’enfant se sentit seul. On ne le comprenait point. Il ne jouait guère, ce qui est souvent, chez un enfant, mauvais signe. Robinson Crusoé, puis Fabiola le ravissaient : le lointain, le passé. Il aimait ainsi à s’exiler de la vie réelle. Des poésies que le professeur expliquait, il ne comprenait pas grand chose : mais le rythme de l’alexandrin, qu’il saisit très vite, lui donnait une étrange sensation de plaisir. Il trouvait un charme aux fables de La Fontaine, dont le sens lui échappait maintenant, mais dont plus tard il ferait ses délices.

Un jour, il eut comme un enivrement. Le maître expliquait et commentait un poème de Victor Hugo : « Le vieux Livre. »

L’enfant ne voyait qu’un coin obscur de grenier, où trois bambins de son âge, les têtes blondes rapprochées, épelaient en les marquant du doigt, les mots