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GUIDO GEZELLE

l’idée fondamentale du poète, aux saisons de l’Église, aux saisons spirituelles de l’âme, et je m’imagine volontiers que Gezelle aurait, dans ses œuvres subséquentes — empêchées, hélas, par la mort, — achevé son cycle et démontré poétiquement l’unité des saisons naturelles et des saisons liturgiques chrétiennes »[1].

Mais les qualités de la pensée et du sentiment de ce poète ne doivent pas nous faire oublier les ressources infinies, l’habileté incomparable de l’artiste. Qui fut jamais épris comme lui des lignes, des couleurs, des nuances, et les disposa avec un art plus heureux ? qui comprit comme lui la valeur évocatrice et plastique des mots ? qui se créa plus de rythmes, imita d’aussi près les musiques éparses dans la nature ?

Gezelle est un magicien du verbe. Il faudrait lire ses vers dans le texte original pour goûter parfaitenent la saveur de ses trouvailles, la fraîcheur de ses peintures, la beauté et l’originalié de ses nombreuses images. C’est un coloriste, qui a épié les effets de la lumière à toutes les heures du jour, sur tous les plans ; et qui s’entend à combiner des nuances, à faire saillir une teinte, à mettre en valeur un rayon ou une étincelle. Sa langue d’ailleurs, très plastique, très pittoresque, lui est un merveilleux instrument. « Enrichie par toute une vie de recherches passionnées, embellie

  1. Aug. Cuppens. Les poésies de Guido Gezelle (Durendal). — On pourrait établir à ce point de vue une comparaison entre les deux recueils de Gezelle et les « Géorgiques chrétiennes », de Jammes, — la « Corona Benignitatis Anni Dei », de Claudel, — les « Saisons mystiques », de Ramaeckers, — « l’Âme des Saisons », de Kinon, — le « Cantique des Saisons », d’Armand Praviel.