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LE BEAU RÉVEIL

Et la mort a fait taire cette voix pure !… Latil est parti sans laisser une œuvre. Ses splendides promesses nous font mesurer la perte qu’ont subies les lettres catholiques, auxquelles il eût fait grand honneur.

Et tout autant, nous plaignons les œuvres religieuses et sociales d’avoir perdu cet apôtre dont la foi et le zèle eussent tant fait pour le relèvement de la France.

Mais ne comptez-vous pour rien la douceur qui rayonne de sa pureté, la force qui émane de ses magnifiques certitudes, l’action incontestable de son souvenir ?

D’ailleurs, que savons-nous ? il y a des morts plus utiles que les plus riches vies. Et le sang, répand par les Saints, acquiert, par la vertu du sang du Christ, une valeur de rachat et une puissance d’intercession incomparables. Plus qu’il ne l’eût fait par son talent, Léo Latil collabore au renouveau chrétien par son sacrifice. Qui sait si les éclatantes conversions de ces dernières années n’ont pas été déterminées par une goutte de sang d’un obscur immolé ? Qui sait si le renoncement généreux d’un Latil ou d’un Lafon aux lauriers terrestres n’a pas obtenu pour Francis Jammes l’inspiration de ses « Géorgiques chrétiennes », et si le « Chemin de Croix » de Paul Claudel n’est pas le fruit d’un humble fiat de ces victimes résignées ? Pour moi, je me plais à le penser. Car il y a la réversibilité des mérites et la communion de Saints.