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LE BEAU RÉVEIL


Et mes yeux se remplissent de larmes,
Et dans les heures douloureuses
Les jours où l’on a peur,
Les jours où l’on a froid,
Les jours où l’on a les yeux et le cœur vides,
Les jours où l’on vacille dans la nuit sans savoir,
Les jours où l’on désespère,
Vos yeux noirs ont rempli mes yeux, Bernadette,
Ô pacification, pacification,
Car je sens bien, petite fille,
Que nous sommes pareils, vous et moi,
Oh ! tout-à-fait pareils…


Nous courons sur les prairies et nous rions
Avec les fleurs ; et puis nous pleurons :
Dans la nuit noire nous nous sentons
Si petits que nous sanglotons désespérément.
— Et puis nous chantons !…
Oh ! les pauvres petites choses que nous sommes, Bernadette ;
Nous ne savons pas, nous ne savons pas,
Et pourtant vos yeux noirs font une consolation,
Vos yeux noirs remplissent mes yeux.
Vos yeux noirs sont baignés d’amour,
Bernadette,
Vous êtes serrée sur le cœur de mon poète.


Ô mon poète,
Vous qui savez les choses,
Vous qui avez souffert profondément,
Vous dont la douleur a été la compagne fidèle,
Vous qui êtes l’ami des fleurs, des petits ânes, et des étoiles,
Vous qui priez,