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LE BEAU RÉVEIL

verbe qui affirmaient encore, fièrement, la beauté et la vertu du Christianisme calomnié :

Tels Villiers de l’Isle-Adam et Barbey d’Aurevilly ; — mais leur œuvre dangereuse fleure plutôt l’odeur de soufre de l’Enfer et des Péchés capitaux que l’encens du Ciel et des Vertus.

Tels encore Ernest Hello penché sur les gouffres du mystère, et après lui, vociférant l’anathème contre les impies et les hypocrites, ce sublime pamphlétaire Léon Bloy qu’on a appelé le « chien de garde de la Cité de Dieu » ; — mais le monde faisait autour de leur génie la « conspiration du silence ».

Tel enfin le pauvre grand Verlaine qui, converti par le malheur, poussa ce beau cri de repentir et d’amour qu’est « Sagesse », mais pour retourner bientôt à son vomissement et rimer les sadiques refrains de « Jadis et Naguère ». Le spectacle, dans son ensemble, était profondément attristant : les sources que Dieu a fait jaillir pour que l’humanité s’y abreuve de pure joie, ces sources semblaient empoisonnées toutes, et l’on y buvait la mort.

Mais la Providence ne voulut point que s’abîmât dans une chute irrémissible la Fille aînée de son Église, ce peuple de France qui eut toujours ses Lohengrin et ses Parcival pour la conquête du Saint-Graal, cette race généreuse qui donna — et devait donner encore — des légions de saints, de génies et de héros chrétiens ! Et sans doute est-ce la grâce prévenante de Dieu (qui agit peut-être envers les peuples comme envers les individus) qu’il faut signaler comme la première cause du renouveau spirituel dont allaient se montrer les indices à l’heure la plus désespérée.