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LE BEAU RÉVEIL


(Je ne veux pas le lui demander)
Peut-être bien qu’elle est cassée
La voix qui était dans son ressort,
Tout bonnement, comme celle des morts.


Il est venu chez moi bien des hommes et des femmes
Qui n’ont pas cru à ces petites âmes.


Et je souris que l’on me pense seul vivant,
Quand un visiteur me dit en entrant :
« Comment allez-vous, Monsieur Jammes ? »…

D’autres se sont attachés à décrire les réalités du terre-à-terre quotidien ; mais souvent en les avilissant. Jammes, lui, les ennoblit, et sans les déformer ; en les éclairant d’un jour supérieur.

Écoutez-le parler des sous amassés par le fermier :


Ce fut ma seule joie en ce monde qui passe :
Cette épargne gardée en ma pauvre besace ;


Le métal reproduit avec fidélité
Tout ce qu’il représente et qu’il peut racheter ;


Mes sous ont conservé le teint brun de la terre ;
L’argent luit, imitant l’eau qui la désaltère ;


L’or ressemble au soleil qui échauffe et pétrit
Cette terre et cette eau dont chacun se nourrit.


Et c’est pourquoi ma main de paysan conserve
Avec respect une humble somme qui vous serve.


De même qu’est frappée au front d’un empereur
La monnaie, la voici marquée de mon labeur.


Que le bonheur des tiens par mes soins se prépare
C’est à tort que l’on fait le campagnard avare ;