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LE BEAU RÉVEIL


…Je leur dirai : « Venez, doux amis du ciel bleu,
Pauvres bêtes chéries qui d’un brusque mouvement d’oreille
Chassez les mouches plates, les coups et les abeilles…
…Que je vous apparaisse au milieu de ces bêtes
Que j’aime tant parce qu’elles baissent la tête
Si doucement, et s’arrêtent en joignant leurs petits pieds
D’une façon bien douce et qui vous fait pitié.
J’arriverai suivi de leurs milliers d’oreilles,
Suivi de ceux qui portèrent au flanc des corbeilles,
De ceux traînant des voitures de saltimbanques
Ou des voitures de plumeaux et de fer-blanc… etc.

La poésie familière avait tenté d’autres poètes. Mais les essais de Brizeux, de Sainte-Beuve, de Coppée sont des tâtonnements. Cela sent encore trop la littérature. Seul Lamartine semble avoir réussi, dans quelques fragments de Jocelyn. Lamartine est simple avec noblesse ; Jammes plutôt avec grâce.

Il a entendu la voix des choses qui n’ont point de voix, vu le sourire ou les pleurs des choses qui n’ont point de regards, senti palpiter le cœur des choses qui n’ont point de vie.

« Les choses sont pareilles à nous, dit-il, souffrantes ou heureuses. Les choses sont douces. D’elles-mêmes, jamais elles ne font de mal. Elles sont les sœurs des esprits. Elles nous accueillent, et nous posons sur elles nos pensées, qui ont besoin d’elles comme pour s’y poser, les parfums ont besoin de fleurs. »

Et, s’adressant aux pierres :

« Pauvres sœurs grises du ruisseau, dit-il, que je