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LE BEAU RÉVEIL

d’un Bazin, d’un Bourget, d’un Barrès, pour résister à la douce tentation d’une petite sieste « sur les lauriers ». Je crois cependant que Jammes ne s’y momifiera point : car bien que « la barbe déjà blanchisse autour de son sourire », il est jeune de cœur, et le demeurera, j’en suis sûr, par une grâce spéciale des fées.

D’autre part, que cette élection soit une marque absolue de mérite, cela est contestable. Car si l’Académie est « l’Immortalité en première instance », la Postérité est quelquefois « la Cour de Cassation ». Et c’est la postérité, presque toujours, qui a raison.

Quoi qu’il en soit et quoi qu’il en advienne, cette élection marquerait un degré de gloire qui, en ce cas-ci du moins, correspondrait à un degré de valeur réelle.

Et ces raisons suffisent pour nous engager à fixer notre attention sur un homme qui force à présent l’attention de tous.

Au temps où nos grands-pères étaient jeunes, naquit à la Guadeloupe, du docteur Jammes, un fils : Louis-Victor, qui fut envoyé tout jeune à Orthez, dans les Basses-Pyrénées, pour recevoir une éducation bien française.

Or, les lointaines et somptueuses colonies avaient député de brillants écrivains vers la France, pour apporter à sa poésie les rutilantes couleurs des paradis exotiques : l’île Bourbon avait donné Leconte de Lisle ; l’île de Cuba, José Maria de Hérédia. La Guadeloupe allait, elle aussi, donner son poète, qui ne la chanterait pas, il est vrai, ne l’ayant jamais vue, mais qui aurait, avec un brin de sensibilité créole et un certain goût de l’exotisme, une palette touchée par tous les rayons si éclatants là-bas.