Il y a douze ans qu'elle dort au haut d'une colline, la face tournée vers le soleil radieux, dans un cimetière où, au milieu des hautes herbes, parmi les croix éparses, ont poussé des milliers de coquelicots dont les racines vivaces plongent dans la pourriture des cercueils.
Aujourd'hui, en fermant les yeux, je vois le convoi funèbre cheminer, entre deux rangées d'oliviers, dans le sentier blanc de poussière conduisant au village. C'est le matin; la chaleur est accablante; on dirait qu'une pluie de métal en fusion tombe du soleil. La campagne semble endormie. Un vent tiède fait onduler les épis mûrs; les cris assourdissants des cigales emplissent mes oreilles; les souffles légers qui se lèvent apportent les vibrations des cloches qui, au village, sonnent le glas des trépassés; au bord de l'eau, du haut d'un peuplier dont les feuilles frissonnent, un rossignol,