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VIE DE MÉLANIE

fusse couverte de tumeurs à la face, au cou et aux épaules : les gens appelaient cela des furoncles malins ; d’autres disaient que c’était la vérole ou variole ; d’autres que j’avais été empoisonnée. J’allais tous les jours faire paître les vaches, mais un soir, quand je me retirais, un homme du voisinage vint me dire : « Mais vous vous exposez à la mort ! Vous avez une très forte fièvre, vous devez vous mettre au lit. » Aussitôt plusieurs femmes s’approchèrent et dirent à cet homme : « Mais les brigands ont emporté la clef ! où voulez-vous que cette enfant aille ? » L’homme reprit : « Elle doit s’en aller, sinon j’aviserai ses parents à Corps. » Au bout d’une semaine environ, un de mes frères vint me remplacer. Oh ! quelle peine j’en eus ! J’aurais mille fois préféré de mourir chez le Moine et que mon frère Henri, âgé de deux ans de moins que moi, ne vînt pas souffrir tant de privations et de mauvais traitements ; et j’étais très fâchée contre moi, contre mes infidélités, cause de tous ces troubles. Le cœur rempli de tristesse, je fus à Corps ; mon père n’y était pas. L’échange, cela se comprend, ne pouvait pas plaire à ma mère qui aussitôt me traita d’inconstante et de délicate. Je comptais cela comme