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tion, mais romaine par sa ressemblance générale avec celle de Lucius Verus, frère adoptif de Marc-Aurèle. L’empreinte antique en était adoucie par un certain flou répandu sur l’ensemble, par le blond délicat des cheveux bouclés et par les lueurs ingénues des yeux clairs. À cinquante-quatre ans Henry Houssaye a conservé ce regard d’honnête candeur ; car il est né naturellement bien élevé. L’éducation parisienne dans sa jeunesse, dans son âge mûr la fréquentation du monde qui désenchante, rien ne semble avoir effleuré cette nature faite de douceur courtoise. Attentif à ne pas blesser en face, fût-ce de l’apparence d’une critique, ceux qu’il ne connaît pas, encore moins ceux qu’il connaît, il était par sa simplicité cordiale un homme d’intimité plutôt qu’un homme de salon. Les qualités du vrai causeur lui font défaut et l’on serait fort déçu si l’on attendait de lui des pensées originales ou des propos saillants. Toutefois il conte les faits très honorablement. Sa voix d’ailleurs ne se prêterait pas à des effets d’éclat. Le timbre, qui, dans les intonations courantes est un peu morne, devient incolore dès qu’il s’élève, tel un cristal qui résonnerait comme du verre et vibrerait comme du bois. Chez Leconte de Lisle, auquel ses manières de politesse affable plaisaient particulièrement, Henry Houssaye ne soutenait jamais à lui seul le poids de la conversation et n’intervenait que pour ajouter ou rectifier les dires des autres et seulement dans la mesure de ce qu’il savait. Par cela même son intervention n’était pas inutile car elle procédait toujours d’une suffisante connaissance des sujets. Ces dons de conscience ponctuelle et de bienséance, Henry Houssaye les a retrouvés pour ses écrits. Bien qu’il se fût destiné d’abord à la peinture, il a fait dans la Revue des Deux Mondes de la très pauvre critique d’art, car, dénué de pensées brillantes qui seules peuvent en masquer la stérilité, ce genre de critique devient aisément fastidieux. Mais, pour les études d’histoire, le tact, la modération, l’exactitude