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annuités en donnant des leçons et, batailleur impénitent, fonda le Qui vive, organe de revendications sociales. Sa subsistance, celle de sa femme et de ses trois enfants se trouvait largement assurée, quand il fut atteint dans sa santé. Réduit au moindre labeur, ressaisi par la gêne, il dut à l’intervention de Mario Proth, qui l’aimait beaucoup, sa nomination d’agent consulaire à l’étranger. Gambetta présidait alors le conseil des Ministres. Mario Proth, qui s’était créé des titres à la bienveillance de l’opportunisme en soutenant avec ardeur les candidatures successives de Jules Ferry, Mario Proth, journaliste et publiciste, mais surtout ami du pouvoir et familier des coulisses officielles, obtint pour Andrieu d’abord un sauf-conduit, puis une audience à Paris. L’audience fut très affable. Andrieu dit comment ses forces étaient menacées par le rétrécissement de l’aorte qui le fit en effet mourir quatre ans plus tard. Gambetta reconnut plusieurs des symptômes dont il souffrait lui-même ; après avoir écrit un mot pour son médecin, qu’Andrieu dut aller voir, il ajouta : « Je connais la vie ; ma situation me permet de vous parler ainsi ; vous me fâcheriez en ne répondant pas franchement, avez-vous besoin d’argent ? — Non, merci, mais d’une place. » Et la question d’une place dans les Consulats fut aussitôt débattue et favorablement résolue. Cependant les bureaux firent de l’opposition. Le ministre des Affaires Étrangères, Barthélemy Saint-Hilaire n’expédiait pas l’ordre de service. Les semaines se passaient ; il fallut une grande colère de Gambetta pour qu’Andrieu devint enfin, aux appointements de onze mille cinq cents francs, titulaire du vice-consulat de Jersey qu’il occupa non sans distinction. On le revit rarement à Paris. Lors de ses courtes apparitions, on le rencontrait dînant avec Lion et Marras chez Brébant. Un soir, Catulle Mendès était dans la salle, ainsi qu’Ary, Renan et Puvis de Chavannes, ceux-ci gros mangeurs et se retrouvant volontiers pour croiser la fourchette