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IX



En 1863, Catulle Mendès avait vingt-deux ans d’âge et cinq ans de séjour à Paris. Il était originaire de Bordeaux où son grand-père avait possédé l’une des banques juives les plus achalandées. Son père, peu soucieux de reprendre les affaires et ne s’y voyant pas invité par le grand-père auquel il n’inspirait pas assez de confiance commerciale, avait laissé glisser la banque aux mains d’un beau-frère, ex-employé du grand-père, le fameux Gomès Vaez qui mourut, dix fois millionnaire, en haut renom dans la localité ; puis, sans s’inquiéter s’il verrait tôt ou tard la fin des soixante-dix mille livres de rentes dont il devait se contenter, il avait donné carrière à ses goûts de déplacement assez dispendieux. Successivement il habita Toulouse, la Belgique, Paris, l’Espagne, l’Italie ; voilà comment, à Naples, suivant je ne sais quel récit, Mendès se serait trouvé baptisé par des moines qui le trempèrent dans un ruisseau. Quoi qu’il en soit de ce baptême, Mendès n’avait pas besoin de lui pour n’être qu’à demi-juif ; car sa mère était catholique. Fille de greflier ou d’huissier audiencier, elle ne possédait pas ce qu’on appelle des lettres ; elle avait même assez peu de culture ; mais, de cerveau très bien constitué, ce fut elle qui transmit à Mendès les dons d’intellectualité. De plus, elle était belle. À quarante-cinq ans, elle en paraissait vingt-huit et, lorsqu’elle passait sur le boulevard avec son fils, elle soulevait des hommages qui faisaient à celui-ci des envieux. Elle fut d’ailleurs très soigneuse