derrière nous, mais aucune sur notre tranchée. Et l’affaire
ne dure pas longtemps. Nous dînons en paix et je vais me
coucher après, car je suis fatigué. Voilà deux nuits que je
n’ai pas fermé les yeux, pour ainsi dire.
Comme chef d’une section, j’ai une petite cabane pour moi seul. On nomme cela un « gourbi » en français… et en arabe aussi. J’aime ma cabane de terre. Un lit de camp, une planche pour jouer le rôle de table, une chaise empaillée venue de quelque maison, voilà mes meubles. Je suis heureux là comme dans un palais.
…Mais d’où viennent-elles les pensées qui m’entourent brusquement, de mon imagination seulement, ou bien du fond des tombes glacées où dorment les cendres des Ancêtres ? Il me semble que je ne fais que continuer une vie commencée depuis longtemps. Le lit, la table, le quartier, jusqu’au pain cuit pour durer longtemps, je connais tout, je me souviens de tout… Peut-être, un de mes pères a-t-il été guerrier comme moi, et que c’est son âme qui s’éveille en mon âme…