mieux instruit de tout. C’est pourquoi, seigneur, je vous supplie de la manière la plus instante de vouloir bien me dire ce qu’il y a contre moi, afin que je ne fasse pas quelque imprudence, dans le doute où je serais de ce qui me condamne ou me justifie.
La curiosité n’est pas mauvaise !
Oui, je suis on ne peut plus curieux de savoir cela. — Mais si votre seigneurie ne veut pas me le dire, — écoutez. — (Il prend le dossier sur la table.) Ceci me paraît être la procédure, c’est elle qui me dira tout, et je ne vous en aurai point l’obligation.
Que faites-vous ?
J’examine le dossier.
Mais songez…
Asseyez-vous, seigneur juge, je vous le répète, et ne me forcez pas à vous le dire si souvent. Voici le préambule, les procès-verbaux, selon l’usage. Je n’ai pas besoin de lire ça ; je sais à peu près ce que ça dit. Venons à l’information. Voici le premier témoin. (Il lit.) « Et ayant reçu en la forme prescrite le serment d’André Ximenès, il a déclaré qu’au moment où parurent les deux cavaliers, il était à couper du bois ; qu’ils se battirent seuls, et qu’un instant après il vit tomber don Diègue ; que la justice étant survenue, don Alonzo voulut s’échapper, mais que son cheval ayant été tué d’un coup d’arquebuse, il s’enfuit à pied en courant, et arriva ainsi à l’habitation de Louis Perez… » (Parlant.) Bon ! voici que j’entre en scène ! (Il lit.) « Que celui-ci pria poliment le corrégidor de ne pas poursuivre avec tant de rigueur ce cavalier ; que le corrégidor s’y étant refusé, alors Louis Perez se mit au milieu du chemin pour en défendre le passage et résister à la justice ; qu’il ne sait pas et ne peut pas dire comment le corrégidor fut blessé. Telle est sa déclaration, qu’il affirme être vraie et sincère, sous le serment qu’il a fait. » (Parlant.) Et il affirme la vérité. André Ximenez est un homme de bien. Passons au second témoin. (Il lit.) « Gil Parrado déclare qu’ayant entendu du bruit, il sortit de Salvatierra, et arriva au moment où Louis Perez se battait contre tous ; qu’il le vit ensuite se jeter dans le fleuve ; et qu’il n’en sait pas davantage. » (Parlant.) Voilà qui est bref ! — Troisième témoin, Jean-Baptiste. — Voyons un peu ce que dira ce vieux chrétien. (Il lit.) « Il déclare qu’il était caché derrière des arbres lorsque les deux cavaliers vinrent se battre ; et qu’ils combattaient avec égalité, lorsque Louis Perez sortit d’une embuscade, et s’étant placé à côté de don Alonzo, tous deux donnèrent la mort à don Diègue, lâchement et traitreu-