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LES TROIS CHÂTIMENTS EN UN SEUL.

doña violante.

Puisqu’il en est ainsi, je ne veux plus vous écouter ; et vous apprendrez par là combien il m’est désagréable d’entendre les prétentions insolentes de cet audacieux en faveur de qui vous me parlez. Vous vous abusez étrangement si vous pensez que ce soit un moyen d’obtenir ma considération, que de venir ainsi me déclarer l’amour d’un autre. Rapportez-lui cela, et adieu.

don lope.

Daignez, madame…

doña violante.

Je ne vous ai que trop entendu.

Elle sort.
don lope.

Elle a compris que j’allais me déclarer, et, aussi prudente que belle, elle s’est servie, pour empêcher mon aveu, d’un détour semblable à celui que j’avais employé. (À Vicente.) Si don Guillen vient ici, dis-lui de m’attendre un moment.

Il sort.
vicente.

Dame Elvire ?

elvire.

Seigneur maraud ?

vicente.

Est-ce que vous n’êtes pas effrayée un peu, vous, de voir de jour ce mien visage ?

elvire.

Ce n’est pas l’embarras, il est fait pour effrayer de jour comme de nuit.

vicente.

Il faut, charmante Elvire, que vous me fassiez un petit plaisir.

elvire.

Quel est ce plaisir, je vous prie ?

vicente.

C’est que vous perdiez l’esprit pour moi. Je ne demande jamais moins que cela à mes maîtresses.

elvire.

J’y consentirais certes volontiers, seigneur Vicente, si je ne vous savais vous-même amoureux fou de Béatrix.

vicente.

De qui, dites-vous ?

elvire.

De Béatrix. On vous a vu causer avec elle.

vicente.

Moi, aimer Béatrix ! Ah ! si vous saviez ce que c’est que Béatrix, jamais vous ne croiriez pareille chose.

elvire.

Pourquoi cela ?