Il se fait tard. Prépare les valises, et mets dans une bourse ces papiers, qui sont pour moi du plus grand intérêt. — Pendant ce temps je vais répondre à mon lutin.
Je vais les mettre là pour ne pas les oublier, et les avoir sous la main… — Je ne demande qu’un moment de répit pour vous adresser une question : Maintenant, mon seigneur, croyez-vous aux esprits follets ?
La sotte question !
Pas si sotte. — Mais quoi ! vous voyez vous-même des effets si étonnants, comme ce présent qui vous arrive dans les airs et vous doutez !… Soit ! puisque cela vous convient ainsi. Mais moi qui ne suis pas aussi bien partagé, je dois croire.
Pourquoi cela ?
Voici comme je le prouve. — Si l’on nous met nos effets sens dessus dessous, vous vous en moquez, et c’est moi qui ai le soin de les ranger, ce qui n’est pas une petite affaire. Si à vous on vous apporte des lettres et l’on vous écrit de doux propos, moi, on me prend mon argent, et l’on me laisse, à la place des charbons. — Si l’on vous apporte, à vous, des douceurs, que vous mangez en silence, moi je ne les goûte ni ne les vois. — Si l’on vous donne des chemises, des mouchoirs et des vallonnes[1], à moi, on ne me donne que le plaisir d’admirer ces jolis présents. — Si quand nous entrons ici tous deux presque en même temps, on vous donne à vous une corbeille si bien garnie et si galante, à moi, on ne me donne sur la tête qu’un coup de poing capable de me faire jaillir la cervelle. — Pour vous, mon seigneur, le profit et l’agrément ; pour moi, l’ennui et la peine. Pour vous, le lutin a la main la plus douce, et pour moi, une main de fer. Laissez-moi donc y croire ; car enfin c’est trop fort, que l’on nie à un homme ce qu’il a vu et senti.
Fais les valises, et partons. Je t’attends par là, chez don Juan.
Il n’y a pas tant de préparatifs à faire pour vous présenter là-bas en habit noir[2]. Il suffit que vous preniez un manteau.
Tu fermeras et emporteras la clef. Si pendant mon absence on