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JOURNÉE I, SCÈNE I.

don félix.

Il n’y a rien de plus ?

don césar.

Mon Dieu, non.

don félix.

Et le prince d’Urbin vous connaît-il ?

don césar.

Ilne m’a jamais vu, et n’a sans doute auprès de lui personne qui me connaisse… il y a tant d’années qu’il est en Allemagne, au service de l’empereur !

don félix.

Eh bien ! si le cœur vous en dit, comme je ne suis pas plus connu que vous à Milan, je m’offre à vous trouver un remplaçant ; de telle sorte que vous puissiez rester ici en secret et donner toute satisfaction à votre amour. Et il n’y a là rien qui puisse offenser ni le duc ni le prince d’Urbin : l’un aura envoyé son compliment, l’autre l’aura reçu. Il ne s’agit que de partir, de donner la lettre, et de revenir au plus tôt avec la réponse.

don césar.

Quand bien même vous ne me feriez pas entrevoir autant de facilités, je suis dans une situation si critique, que je courrais volontiers de plus grands risques.

tristan.

Je crois bien que j’indiquerais un meilleur moyen d’arranger le tout.

don félix.

Tais-toi, imbécile.

don césar.

Enfin, est-ce que vous consentiriez à me rendre ce service ?

don félix.

Je ne suis point de ceux qui donnent un conseil et qui reculent à l’exécution. J’irai en votre lieu et place.

don césar.

Je vous baise les pieds mille fois, et…

don félix.

Assez ! de grâce, épargnez-moi. Entre amis tous ces remerciemens sont superflus.

don césar.

Il n’y a plus maintenant qu’une difficulté.

don félix.

Qu’est-ce donc ?

don césar.

J’ai à toucher chez le seigneur Aurelio, père de Violante, une certaine somme que le duc m’a accordée pour m’aider dans mes dépenses, et ainsi on me croira plus aisément parti ; mais alors je crains que Violante ne m’attende plus demain.