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LE PIRE N’EST PAS TOUJOURS CERTAIN.

don diègue.

Je ne l’ai jamais espéré ; je savais trop que mon peu de mérite ne pouvait pas élever si haut ses prétentions.

béatrix.

Il est vrai, et aujourd’hui moins que jamais.

don diègue.

Pourquoi donc, madame ?

béatrix.

Parce que des outrages ne sont point des titres à l’amour.

don diègue.

Permettez-moi de dissiper vos soupçons.

béatrix.

Cela ne vous sera pas facile.

don diègue.

Peut-être.

béatrix.

Don Diègue, l’heure est hasardeuse, la porte ouverte, mon bonheur douteux. — Allez-vous-en, ne me perdez pas.

don diègue.

Non, non, je ne laisserai pas échapper une occasion si favorable. Veuillez d’abord m’entendre, et puis je pars.

béatrix.

Inès, veille à cette porte. — Puisqu’il faut que j’achète à ce prix votre départ, je vous écoute.

Inès sort.
don diègue.

Eh bien ! belle Béatrix, lorsque je partis de Valence…


Entre INÈS, tout effrayée.
inès.

Ah ! madame !

béatrix.

Qu’est-ce donc ?

inès.

C’est mon maître !

béatrix.

Quel malheur !

inès.

Allons, qu’attendez-vous ? Nous avons le refuge de cette nuit ; il peut nous sauver encore.

don diègue, se cachant.

Fut-il jamais un amour plus contrarié ?

béatrix.

Fut-il jamais une étoile plus funeste ?

inès.

Du courage, madame ! n’ayez pas peur, ne vous troublez pas…