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LE GEÔLIER DE SOI-MÊME.

le roi, à part.

Elle a bien vite consenti, et je vois dans ses yeux qu’elle en est toute heureuse. Mais ne nous trahissons pas.

l’infante, à part.

Une fois que mon père m’aura vue en présence de celui que j’aime, il ne pourra plus s’opposer à mon mariage.

Ils sortent.

Scène II.

Une chambre.
Entrent DES MUSICIENS, ROBERTO et BENITO, qui s’habille.
roberto.

Comment votre altesse a-t-elle passé la nuit ?

benito.

Fort bien. Jamais je n’ai fait un meilleur somme, ni dans un lit aussi beau et aussi riche. Aussi je croyais que je ne me réveillerais plus, et je me regardais comme le prince des loirs.

roberto, aux Musiciens.

Chantez pendant que son altesse s’habille.

un musicien.

Chantons cet air nouveau qui est si joli.

On chante.
benito.

Roberto ?

roberto.

Seigneur ?

benito.

Dites donc à ces braillards de laisser là leurs bêtises, et que s’ils veulent être bien aimables, ils me chanteront la fameuse chanson, vous savez…

Il chante.

Le joyeux Morales
S’en allait à cheval…

roberto.

C’est cette chanson que vous préférez ?

benito.

Je crois bien ; il n’y en a pas d’aussi jolie. C’était toujours ma chanson quand j’allais dans la forêt avec Antona.

roberto.

Se peut-il, que votre altesse ait si promptement oublié qui elle est ? — La douleur vous a ôté le jugement.

benito.

Ah ! c’est vrai ; j’oubliais que tout le monde m’appelle le prince… je ne sais plus comment.

roberto.

Frédéric de Sicile.