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MAISON À DEUX PORTES.

marcela.

En vérité, seigneur, je crains que cela ne vous gène, et je n’ose accepter votre offre.

fabio.

Nullement, madame : je tiens à aller avec vous.

marcela.

Puisque vous voulez absolument m’accorder cet honneur, il serait peu gracieux à moi de me refuser à une telle courtoisie.

fabio.

Veuillez me donner votre main.

marcela.

Vous êtes trop galant. Volontiers.

Sortent Fabio, Marcela, Herrera et Silvia
laura.

Ah ! Celia, dis-moi ; dis-moi, y a-t-il une situation plus cruelle que la mienne ?… Personne ne croirait que l’homme que je tiens ici renfermé m’est inconnu. Et lui, s’il me voit, ne pensera-t-il pas qu’il a été trompé, et que Marcela n’est pas la maîtresse de la maison ?

celia.

Il est facile de parer à tout cela, grâces à l’absence de mon maître. Retirez-vous un moment. Je ferai sortir de la ce cavalier, et il ne s’en ira pas détrompé, puisqu’il s’en ira sans voir ni vous ni Marcela.

laura.

Tu as raison, je te laisse ; ouvre-lui au plus tôt. — Mais non, il me semble que j’ai entendu du bruit dans la salle voisine.

celia.

Autre embarras !


Entre DON FELIX.
don félix.

Ah ! Laura !

laura.

Quoi ! vous !… Déjà ! don Félix !

don félix.

Oui, Laura. À peine le jour a-t-il commencé à disparaître, que j’ai accouru me poster dans votre rue. Un vif désir rend impatient, j’ai vu ma sœur sortir d’ici accompagnée de votre père, et je me suis enhardi à entrer ; car notre raccommodement m’inspire tant de joie, que je n’ai pas voulu tarder un moment à vous voir radoucie a mon égard.

laura.

Vous avez eu tort, don Félix. À peine m’avez-vous délivrée d’un chagrin, que vous m’en donnez un autre. (À part.) Je ne sais que lui dire, et n’ai pas la force de parler. (Haut.) Pourquoi avez-vous pénétré ici imprudemment, sans considérer que d’un moment à l’autre mon père peut rentrer ?