Scène II.
Ç’a été un grand bonheur pour moi, don César, que je me sois arrêté dans cette maison de plaisance, puisque je vous y trouve. Je ne l’espérais pas.
C’est ma bonne étoile qui vous a conduit ici. Embrassons-nous de nouveau.
Mes bras vous enlaceraient si fortement que la mort même ne pourrait leur faire lâcher prise. — Que faites-vous ici ?
Oh ! ce serait fort long de vous conter tout cela, et fort triste !… Il se voit bien, don Juan, que vous revenez de Flandre, puisque vous ignorez ce qui s’est passé.
J’ai déjà ouï dire, mon ami, que vous aviez éprouvé de grands malheurs ; c’est pour cela que je me suis étonné d’abord de vous trouver ici aussi tranquille.
Je ne le suis pas autant que vous croyez, don Juan ; je vis au milieu de soucis perpétuels ; si je ne vous eusse pas reconnu, je ne serais pas sorti à votre rencontre. Je me tiens ici caché en attendant une occasion de partir pour l’Espagne ; le maître de cette maison de plaisance a bien voulu la mettre à ma disposition, et je m’y regarde comme en un lieu d’asile. Si l’on m’y venait chercher par hasard, j’ai une barque qui m’attend sur la rivière ; je m’y jetterais, et en ramant je gagnerais bientôt la mer, où je serais en sûreté.
Je me réjouis d’arriver ici en un moment où je puis me flatter de vous servir. Vous saurez, mon ami, que déjà je ne suis pas sans influence à Gaëte. J’y viens, amant fortuné, pour épouser l’illustre Lisarda, jeune personne riche et noble, très-belle et très-charmante, dit-on, par-dessus, et d’ailleurs fille unique de don Juan d’Aragon. Mon beau-père futur est gouverneur de ce pays, et son pouvoir me permettra sûrement de vous être utile à quelque chose.
Ce ne sera pas la première fois que vous m’aurez rendu service ; je n’ai pas oublié tout ce que je vous dois… Puisse cette union être aussi fortunée que je le souhaite ! puissiez-vous y trouver long-temps la paix es l’amour ! Mais en laissant là ces complimens et bien d’au-