Voilà le résultat de votre absence. Les voleurs auront su que vous étiez dehors, — et cela les aura encouragés.
Je vais visiter la maison. (À part.) Mais je tremble de découvrir la vérité ; il y a là-dessous quelque horrible mystère.
Ç’a été bien hardi à vous, madame, de vous décider à cette action.
J’y ai trouvé mon salut.
Comment avez-vous pu vous y décider ?
Par la raison que si je n’eusse rien dit et que don Gutierre se fût aperçu de quelque chose, — il aurait pu croire que j’étais la complice de l’infant ; et puis je n’avais que ce moyen de le sauver. — Tu vois, le ciel m’a protégée.
Ce poignard si riche n’est pas l’arme d’un homme obscur. (Il le cache sous son manteau.) Ô ma chère Mencia ! vous avez été abusée par une vaine illusion. J’ai visité toute la maison du haut en bas, et je n’ai pas même aperçu l’ombre d’un homme. (À part.) Hélas ! je cherche à me tromper moi-même, car ce poignard soulève en mon sein mille soupçons, mille terreurs. Mais le moment n’est pas venu encore. (Haut.) Mencia, mon cher bien, ma chère épouse, voici le jour qui commence à paraître à l’horizon ; il faut que je parte. Je regrette vivement d’être obligé de te laisser, — de te laisser ainsi toute émue, après cette aventure ; mais il le faut.
Vous ne m’embrassez pas, monseigneur ?
Je ne l’aurais pas oublié, ma chère vie.
Ah ! seigneur. — Quoi ! vous voulez me tuer ! Grâce, je vous prie ! Je ne vous ai point offensé !… Grâce ! grâce, monseigneur !
Pourquoi ce trouble, Mencia ? — Remettez-vous, mon bien, mon épouse, ma vie, mon âme !
C’est que, monseigneur, en vous voyant armé de ce poignard, je me suis imaginée que vous m’en portiez un coup, et que je tombais ici blessée, et que je mourais baignée dans mon sang.