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la vue, doux au toucher, voilà toute sa parure. Elle ne sait ce que c’est que de recourir à l’art pour séduire ses pareils : sa taille ronde et bien fournie, n’a jamais été gênée dans une carcasse de baleine ; elle n’a point la manie de s’estropier, pour avoir de petits pieds ; elle cède aux Babyloniennes ces ridicules agréments. Son regard est pudique, sa démarche honnête ; elle inspire à la fois, et la décence et la volupté ; ses dents sont plus blanches que l’ivoire : elle n’affecte point de grimaces pour les faire admirer ; elle ne met ni blanc, ni rouge, ni bleu ; sa beauté n’a pas besoin de ces secours artificiels. D’ailleurs, les moments d’une ânesse sont trop précieux pour les consacrer à la frivolité ; nos ânesses sont sages et laborieuses : la coquetterie ne sera jamais leur défaut.

La vanité n’est pas non plus celui de l’âne : qu’il ait une housse d’or ou de toile sur le corps, il s’en inquiète fort peu ; et ceux qui le connaissent, ne l’en estiment pas moins. Tous les baudets de Montmartre savent que souvent les ap-