Page:Cahiers du Cercle Proudhon, cahier 5-6, 1912.djvu/32

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

les sentiments. » Et il ajoutait, à la fin de son article : « Il est probable que tant qu’il ne s’agira que de lutter par l’habileté et la ruse, le pouvoir des gens de la deuxième catégorie ne pourra pas être ébranlé, mais il est un écueil sur lequel il pourra venir se briser celui de la force brutale. Ce fut ce qui arriva à Rome. Dans les comices, les politiciens étaient et demeuraient les maîtres ; ils furent vaincus d’abord par les légions de César, ensuite par celles d’Auguste, bien des signes font voir que, actuellement, des gens supérieurs à leurs maîtres par l’énergie et le caractère, mais inférieurs par la ruse, commencent à prendre conscience de leur force. On discute si « un coup de force est possible ». Des syndicalistes refusent de se laisser duper par les élections et préconisent « l’action directe ». Des essais partiels de l’usage de la force, tels que l’émeute des vignerons du Midi, en France, et celle de l’Aube ont eu lieu… Des jeunes gens insultent les politiciens. » Contre ce règne des spéculateurs et des financiers, caractérisés par une lâcheté essentielle, et qui ne peut se maintenir que par l’habileté et la ruse, il n’y a donc, selon M. Pareto, qu’un recours celui de la force brutale. Contre l’or, il n’y a que le fer qui puisse prévaloir, et c’est pourquoi dans tout ce monde moderne, ploutocratisé jusque dans les moelles, il y a un préjugé si universel contre la violence, et, dans toutes les classes, un si grand esprit de conciliation. La transaction est, naturellement, la loi essentielle d’un monde marchand : sur un marché, tout peut et doit se marchander. La Finance, comme le disait Nietzsche dans le passage que je citais plus haut, favorise la puissance de la moyenne, c’est-à-dire de la médiocrité qui, en l’absence de toute conviction forte, est toujours pour la « tolérance », pour la « liberté », pour la « transaction ». Elle