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se place sur le terrain démocratique et fait du suffrage universel le principe du quatrième État, le syndicalisme repousse toute action ouvrière hétéronome ; le syndicat organise sa doctrine, sa lutte, ses outils de lutte. Antonio Labriola a parfaitement résumé la séparation progressive des idées socialistes et syndicalistes[1]. Théoriquement, on sait comment s’est manifestée l’opposition du parti socialiste et des syndicats ouvriers, par la triple affirmation de l’indépendance syndicale au congrès d’Amiens, en octobre 1906, au congrès de Limoges, au congrès de Nancy d’août 1907[2].

M. Edouard Berth n’a pas moins bien montré l’opposition du syndicalisme avec cette autre doctrine démocratique : l’anarchie. « Le syndicalisme révolutionnaire, a-t-il écrit, est une philosophie de producteurs. Il conçoit la société sur le plan d’un atelier sans maîtres… et tout ce qui n’est pas fonction de cet atelier doit à ses yeux disparaître : donc, en première ligne, l’État qui représente par excellence la société non-productrice, la société parasitaire… » Mais « le syndicalisme reconnaît profondément que la civilisation a débuté et dû débuter par la contrainte, que cette contrainte fut salutaire, bienfaisante et créatrice, et que, si l’on peut espérer un régime de liberté sans tutelle patronale, comme sans tutelle étatique, c’est encore grâce à ce régime de contrainte lui-même qui a discipliné l’humanité et l’a rendue peu à peu capable de s’élever au travail libre et volontaire »[3]. Mais quoi de plus opposé

à la conception anarchiste ? « Qu’il soit d’origine artisane, agricole ou mondaine, l’anarchisme est toujours

  1. Antonio Labriola. Syndicalisme et socialisme. — Le syndicalisme et le socialisme en Italie, Paris, Rivière, 1908.
  2. Griffuelhes. L'Action syndicaliste.
  3. Berth. Les nouveaux aspects du socialisme.