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Une âme un peu noble se méfie, d’elle-même, instinctivement et sans qu’on ait rien à lui en dire, de tout ce qui ressemble à de la domination temporelle. Un homme un peu propre a peut-être encore plus d’horreur, instinctive, d’exercer quoi que ce soit qui ressemble à de la domination intellectuelle temporelle que de la subir. Il n’y a donc pas lieu d’y insister. Il n’y a pas même lieu d’en parler. Ce qu’il faut dire, ce qu’il faut examiner un peu, c’est si la tentation de la gloire, qui atteint, qui entame justement les âmes élevées, d’ailleurs inattaquables, ne serait pas devenue, elle aussi, dans le monde moderne, une tentation de domination temporelle, d’autant plus pernicieuse qu’elle est plus insidieuse, d’autant plus redoutable qu’elle est plus insinuante et qu’elle se glisse à des âmes plus précieuses ayant elle-même revêtu les aspects presque d’une vertu, presque d’un devoir, presque d’une obligation métaphysique et morale.

De bons esprits s’aperçoivent aisément, de naissance, de race, et sans qu’il soit besoin de les tirer par la manche, de ce que c’est qu’une domination temporelle, sous les formes grossières, connues, classées, de ce que cela pèse, de ce que cela vaut. Quelques bons esprits peuvent ne pas s’apercevoir que la gloire elle-même, que la vieille gloire, qui en effet était venue au monde, au vieux monde, plutôt comme une puissance spirituelle, que la gloire du vieux temps est devenue dans le monde moderne, par une opération de l’encroûtement du monde moderne, elle aussi une puissance temporelle, moderne, comme il y en a malheureusement tant d’autres.

Je dis encroûtement parce que je ne suis pas scientifique. Si j’étais savant je dirais incrustation, cela ferait