ment sain, et que le séjour au Nouvion en Thiérache est
particulièrement restaurateur. On ferait non pas tout à
fait peut-être toute l’histoire de la troisième République,
mais certainement toute l’histoire des responsabilités
qu’il y eut à prendre sous la troisième République pour
les gens qui fréquentaient dans les régions du pouvoir
par la table des présences et des absences de
M. Lavisse. Quand le ciel, j’entends le ciel politique,
était clair, notre maître était à Paris, bien portant.
Quand le ciel s’assombrissait, M. Lavisse, soudain se
sentant fatigué, qui sait, malade, partait pour le
Nouvion. Tant que le temps demeurait obscur, notre
maître restait au Nouvion. Ce doit être une fameuse station,
ce Nouvion. Et je ne veux pas dire seulement une
station de chemin de fer. Je veux dire une station de
convalescence. Quand le ciel s’éclaircissait enfin,
M. Lavisse, gaillard, s’en revenait du Nouvion en
Thiérache. Il était comme un ludion, comme un de ces
petits bonshommes qu’une pression du doigt fait monter
ou descendre. Il y aura une belle thèse à faire plus tard,
mais sera-t-elle pour la Faculté des Lettres ou pour la
Faculté des Sciences de l’Université de Paris. Pendant
l’affaire Dreyfus notamment, on en eût fait des graphiques.
Il en faut dans une thèse. Cet homme était
devenu un baromètre sinon tout à fait de la situation
politique du moins des difficultés, des gravités de la
situation politique, (des lourdeurs, c’est le propre d’un
baromètre). On eût fait des tables de concordance, et
des diagrammes, (eussent-ils été historiques, eussent-ils
été géographiques), des variations de la situation politique
par et d’après les déplacements de l’index
Lavisse.
Page:Cahiers de la Quinzaine, 14e série, n°9-11, 1913.djvu/177
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