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Et c’est assez réussi pour un pacifiste. Il ne fait (j’allais dire malheureusement) aucun doute que pendant les deux ou trois années de la guerre de l’affaire Dreyfus M. de Pressensé fut une sorte de héros. Et quand je dis une sorte, j’ai tort. Je me laisse aller à un mouvement de mauvaise humeur, à un mouvement de restriction parfaitement idiot. Il fut un héros de toute sorte, et particulièrement de la sorte militaire. Ceux qui ont gardé le souvenir des conférences Mirbeau-Pressensé-Quillard et des invraisemblables tournées en province savent, et nous témoignerons toujours, que Quillard, qui est mort, que Mirbeau, que j’exècre, et que Pressensé, que je ne puis décidément plus souffrir, se comportèrent comme des héros. Le malheur est que l’on ne peut évidemment pas toujours se battre et qu’un jour il faut signer la paix. La paix dans cette guerre, la paix qui termina cette guerre fut ce que l’on nomma l’amnistie, contre laquelle nous ne cessâmes pas de nous élever. Quand cette paix boiteuse eut été signée, quand M. de Pressensé fut devenu un demi-solde du dreyfusisme, il perdit complètement le nord. Et notamment le nord du dreyfusisme. D’abord il crut que ce n’était pas souscrire à l’amnistie que d’en violer constamment les clauses par des forfaitures, par des retenues, par des inventions frauduleuses, oubliant qu’une paix faussée n’est point la grande guerre et qu’elle cumule au contraire dans un rassemblement contradictoire les vices d’une mauvaise paix et les vices d’une mauvaise guerre. Mais c’est un sophisme de raison et un sophisme de conduite qui est demeuré très fréquent. Nous essaierons de l’analyser un peu si j’arrive à parler un jour du cas ou comme on dit de l’affaire du Paty de Clam et d’un autre cas que je

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