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gonflons pas et ne faisons pas les sots, et ne disons pas que nous l’avons dépassée. Car il n’y a pas de quoi nous vanter et faire les malins. Tout ce qui se produit alors signifie simplement que nous sommes désaccordés.

Un esprit qui commence à dépasser une philosophie est tout simplement une âme qui commence à se désaccorder du ton et du rythme, du langage et de la résonance de cette philosophie. Quand nous ne consonons plus, alors nous disons que nous commençons à nous sentir libérés.

C’est vraiment en ce sens que le moderne est libre. En ce seul sens. Il y a seulement une différence. Quand cette liberté fonctionne à son avantage, quand elle fait le jeu de ses intérêts, le moderne se vante, et hautement, de cette liberté. Il n’en a pas toujours été ainsi. Il n’en est pas ainsi dans notre commune estimation de la mise au linceul des mondes précédents. Si la mémoire d’Hypatie demeure une des plus hautement honorées entre toutes les mémoires humaines, si elle a une situation presque unique dans un Panthéon des mémoires qui n’est pas au bout de la rue Soufflot, ce n’est point seulement parce que la fidélité dans le malheur, poussée, poursuivie jusqu’à demeurer fidèle dans une sorte de malheur suprême, et non plus seulement d’infortune et d’adversité, dans un malheur véritablement métaphysique, dans une sorte de malheur suprême, de finale catastrophe allant jusqu’à une espèce d’anéantissement peut-être total, ce n’est point seulement parce que cette